Le mythe du site web extensible et évolutif
Un des mythes les plus répandus parmi les clients est l’extensibilité infinie d’un site web. Nous entendons par là la capacité d’un site web à croître sans arrêt et sans nécessiter de travaux majeurs s’apparentant à une refonte complète.
Est-il possible d’étirer la durée de vie d’un site web de façon indéfinie en prévoyant et en concevant de manière à le rendre infiniment extensible?
Bien qu’il soit possible de planifier une croissance notable des contenus, il existe toujours une limite qui est généralement liée aux types de contenus. Ainsi, bien qu’il soit possible de créer relativement aisément un site qui pourra publier un nombre très élevé de contenus de même type (articles, communiqués, fiches de produits), les problèmes surviennent généralement lorsque le client souhaite ajouter un type de contenu différent.
Par exemple, un client habitué à ajouter des communiqués de presse utilisera toujours les mêmes items, liés aux champs d’une base de données et à différents éléments de l’interface visibles pas les visiteurs du site. Si le client souhaite ajouter un nombre X de communiqués de presse, le seul stress causé au système sera lié à la capacité de mémoriser plus d’information sur support numérique, ce qui est aujourd’hui possible à très bas coût.
Si le client demande à stocker et publier un type d’information différent, il faudra créer une nouvelle table dans la base de données, un nouvel interface de gestion et revoir les pages du site web pour accomoder le nouveau type de contenu. Évidemment, une fiche de produit ne se publie pas dans un format comparable à celui d’un communiqué de presse.
Il est facile de comprendre que de nouveaux types de contenus demandent donc une révision en profondeur des procédés de gestion du contenu derrière le site, mais qu’en est-il du site lui-même, de la partie visible pour les visiteurs?
Il est facilement possible de créer un nouveau modèle de page visuellement cohérent avec l’ensemble du site pour chaque nouveau type de contenu. Il faut maintenant rattacher ces nouvelles pages dans un ensemble cohérent grâçe à un interface permettant de naviguer vers ces sections et d’en sortir, de rendre fluide la navigation entre les nouveaux contenus et le site initial.
C’est ici que se pose la limite d’extensibilité d’un site.
Il est impossible à un concepteur de prévoir l’ensemble des possibilités et évolutions des affaires d’un client pour les prochaines années. Bien que de prévoir la possibilité d’ajout de différents types de contenus fasse partie des bonnes pratiques reconnues, il existe une limite à ce qu’un concept graphique peut supporter en tant que modifications et ajouts d’éléments d’interfaces supplémentaires.
Par exemple, une barre de menu horizontal pourra prendre de l’expansion jusqu’à un certain point défini par plusieurs facteurs: taille minimale des caractètes pour qu’il restent lisibles, définition horizontale des moniteurs des visiteurs, etc. Que faire une fois que tout l’espace horizontal a été utilisé? Doit-on blâmer le concepteur pour son manque de prévoyance?
Absolument pas. Il faut comprendre qu’un interface est le résultat d’une réflexion qui se produit à un moment donné, avec des objectifs spécifiques propres à ce moment. Il est quelquefois utile de sacrifier l’extensibilité à la convivialité. Par exemple, est-il préférable de concevoir des libellés d’interface comportant des textes très petits, donc peu lisibles, dans l’éventualité où le nombre d’éléments serait appelé à grandir, ou encore d’utiliser de façon optimale l’espace disponible, de favoriser la lisibilité au prix d’une refonte ultérieure?
Il est très difficile d’analyser avec précision les coûts reliés aux deux décisions pour les comparer. Le problème vient des coûts cachés d’une conception peu adaptée: clients perdus, réputation de l’entreprise ternie (« s’ils ne sont pas capables d’avoir un site web qui a du bon sens, quelle qualité de produits génèrent-ils? »), etc. Ces coût inconnus devraient toujours être comparés aux coûts généralement minimes d’une refonte des éléments du site impossibles à faire évoluer au-delà d’une certaine limite pour prendre une décision éclairée.
Ce qui peut être récupéré
Une fois que le site a atteint ses limites, faut-il le revoir au complet? Pas nécessairement. Certains éléments, s’ils sont bien conçus dès le départ, seront récupérables et permettront de réduire l’investissement nécessaire lors des travaux de refonte.
- L’utilisation de feuilles de styles (CSS) permettra de séparer le contenant (styles) du contenu (textes, images, etc) et de faciliter ainsi une refonte du site. En intervenant uniquement sur les feuilles de style d’un site bien conçu, il est possible de modifier en bloc son apparence sans avoir à revoir l’ensemble des pages du site. Cela diminue énormément les coûts d’une intervention visant uniquement à revoir l’apparence des pages.
- Les différents éléments de navigation devraient pouvoir permettre une certaine croissance des éléments de contenus (limitée mais réelle). L’utilisation de menus à déploiement vertical (drop-down) permet d’ajouter des sous-catégories aux catégories principales sans avoir à bouleverser l’ensemble du concept graphique. Une solide catégorisation des contenus (composante de l’architecture de l’information) est nécessaire pour permettre d’étirer au maximum la durée de vie du site à ce niveau.
Ce qui doit être refait
Quels sont les éléments qui devront absolument être revus lors de l’ajout de types de contenus importants à votre site?
- La page d’accueil du site
La page d’accueil est souvent un ensemble de raccourcis vers les contenus les plus importants de votre site. Elle doit en refléter la structure et le contenu et être en profond accord avec vos objectifs de marketing. Par conséquent, il est impensable d’ajouter des contenus réputés importants sans leur trouver une place sur la page d’accueil. Puisque l’espace disponible sur cette page est plutôt restreint, il est difficile d’ajouter un élément important sans bouleverser son apparence. La conception de la page d’acceuil repose souvent sur une hiérarchisation des objectifs du client déclinée en éléments de contenus. Par exemple, si votre principal objectif est d’offrir des emplois en ligne, votre page d’acceuil devra l’exprimer clairement en positionnant cet élément de manière à le rendre immanquable. Si vous ajoutez des contenus importants et prioritaires, ils devront être positionnés en conséquence, et bousculer le reste. Votre page d’accueil devra donc être modifiée en profondeur de façon à rééquilibrer les différents éléments qui la composent selon vos nouveaux objectifs de communication ou de marketing. - La navigation
Tel qu’expliqué précédemment, la navigation doit pouvoir permettre une certaine croissance, notamment au niveau des sous-catégories. Par contre, à partir d’un certain point, un nombre trop élevé de sous-catégories demandera un restructuration de l’information et l’éventuelle création d’une nouvelle catégorie principale. Prenons l’exemple des fabriquants d’automobiles. Il y a quelques années, le terme VUS (Véhicule utilitaire sport) était encore inconnu. Il y avait des voitures ou des camions. Deux catégories principales. Lors de l’apparition des premiers modèles de VUS, la relative rareté de ces hybrides permettait encore de les classer soit dans les voitures, soit dans les camions. Le nombre rapidement croissant de modèles couplé à la reconnaissance d’un certain créneau ont amenés la création d’un nouveau terme, le VUS, et d’une nouvelle catégorie. C’est un exemple concret du passage d’éléments de contenus d’une sous-catégorie dans laquelle ils sont plus ou moins bien identifiés à la création d’une nouvelle catégorie principale mieux adaptée. La navigation de votre site web doit donc suivre l’évolution de vos contenus, produits et services. S’il est facile d’ajouter un modèle de véhicule dans la catégorie des VUS, il est plus difficile d’ajouter une nouvelle catégorie à un interface sans le revoir en profondeur. - l’utilisation de la technologie
Quoi qu’on en dise, votre site web évolue avec l’attrait de nouvelles technologies et possibilités comme un des facteurs de motivation. Il suffit qu’un concurrent offre une nouvelle façon d’accéder au contenu de manière efficace pour bouleverser la façon de faire des sites web dans une industrie. Les nouvelles technologies offrent quelquefois des avantages concurrentiels marquants dont vous voudrez bénéficier; lorsque tous vos compétiteurs utiliseront une technologie ET que vos visiteurs la demanderont, il sera temps de l’intégrer à votre site. - l’esthétique
Votre site doit-il refléter toutes les modes et les tendances? Bien sûr que non. Par contre, il faut tout de même admettre que certains sites ont un design plus actuel et semblent par conséquent mieux maintenus. Il ne s’agit pas de changer l’apparence du site pour le plaisir « d’être à la mode » mais plutôt d’adapter l’esthétisme aux évolutions techniques. Un exemple concret est la montée fulgurante du look « Blog » pour plusieurs sites corporatifs. Ce nouvel esthétisme répond à deux impératifs: d’abord, une adaptation à un contenu plus dynamique et à un système de gestion correspondant et ensuite, une volonté de remplacer l’excès d’images des sites de la dernière génération par du contenu rédactionnel. Ce dernier point est une réaction aux tendances du marché, elles-mêmes dictées par le comportement des internautes: les gens veulent du contenu, donnons leur du contenu. Pour ce faire, il faut adapter son site pour une meilleure lisibilité, éventuellement changer la police de caractère utilisée, rendre les illustrations moins distrayantes, etc. Tout cela a de profondes conséquences sur l’apparence générale du site web.
En conclusion
Quelle est la durée de vie d’un site web? L’expérience nous montre qu’un site moyen conserve son apparence et sa structure de contenus durant environ 3 ans. Évidemment, de nombreux facteurs peuvent influencer cette durée. La meilleure façon de prolonger la vie d’un site ou encore d’optimiser le rendrement de sa vie utile est probablement de planifier soigneusement la catégorisation des contenus et de prévoir un système de gestion permettant l’ajustement de cette catégorisation.